Jamais ta vie par procuration
Car ton cœur toujours en fusion
Dans tes yeux une éternelle nuit
En ton esprit une symphonie
Tu respectes les lois
Mais tu t’en affranchiras
Pour celui qui voleras
Aussi haut que toi
Du cœur jusqu’aux reins
Et toujours près de ton sein
Tu le ferais planer milles ans
Ou jusqu’à la fin des temps
On croit connaitre la musique
Il faut t’avoir vu l’écouter
Lorsque d’une notre coule une larme
Des langoureux mots, un flot entier
Tu fais chanter le café crème
Au petit matin quand il pleut
Même les nuages t’aiment
Tu es soleil sous leurs yeux
Pour une heure de ta tendresse
Le loup rampe à tes pieds
Nul besoin de laisse
Car il ne cherche qu’à t’aimer
Lorsqu’enfin les lèvres se taisent
Et que le verbe se simplifie
Comme un oiseau couvre son nid
Enfin un million de baisers t’apaisent
Un peu comme la guérison
D’une maladie inconnue
Ton amour en mille frissons
Tu fais couler sur l’âme nue
P.G.P.
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lundi 31 août 2015
vendredi 28 août 2015
jeudi 27 août 2015
mercredi 26 août 2015
dimanche 23 août 2015
Il n’est que dans l’espace
Il n’est que dans l’espace où l’on célèbre, que la plainte
peut marcher, la nymphe de la source pleurée,
veillant afin que ce qui de nous se condense
sur le même rocher demeure transparent
qui porte les autels et les portiques.
Vois, sur ses épaules tranquilles naître
l’aube de sa conscience d’être
la plus jeune parmi les sœurs dans l’âme.
Le bonheur sait et le désir avoue, —
la plainte seule apprend encore ; ses mains de jeune fille
comptent des nuits durant l’ancien désastre.
Mais tout à coup, d’un geste oblique et inexpert,
elle tient pourtant une constellation de notre voix
dans le ciel que son haleine ne trouble pas.
peut marcher, la nymphe de la source pleurée,
veillant afin que ce qui de nous se condense
sur le même rocher demeure transparent
qui porte les autels et les portiques.
Vois, sur ses épaules tranquilles naître
l’aube de sa conscience d’être
la plus jeune parmi les sœurs dans l’âme.
Le bonheur sait et le désir avoue, —
la plainte seule apprend encore ; ses mains de jeune fille
comptent des nuits durant l’ancien désastre.
Mais tout à coup, d’un geste oblique et inexpert,
elle tient pourtant une constellation de notre voix
dans le ciel que son haleine ne trouble pas.
Rainer Maria Rilke, Recueil : Sonnets à Orphée
Mystic
Le fleuve Mystic a un beau nom mystérieux. Un fleuve très très court, moins de trente kilomètres, se déversant dans la baie de Boston, en passant pas un petit coin du Connecticut. Le nom Mystic est la déformation anglaise du mot algonquien Mistuk, qui veut dire «bois», rivière boisée. Sur ce fleuve, le 26 mai 1637, les milices puritaines réunies du Connecticut et du Massachusset attaquèrent un village de la nation des Pequots. Les miliciens massacrèrent 500 Pequots. Les survivants furent envoyés aux Barbades en échange de cargaisons d'esclaves noirs. La nation ne s'en remit jamais, perdant en un jour sa terre, sa vie, son nom. Le mot même de Pequot fut en effet banni du vocabulaire puritain. Au moment de la tuerie, le petit peuple se relevait à peine d'une épidémie de variole qui avait emporté la moitié d'entre eux. Fleuve Mystic, tristesse de la mémoire, site de la première guerre coloniale d'extermination au nord du Mexique, là où mourut Sassacus, le représentant des Pequots, guerrier et diplomate, premier parmi les victimes. L'Amérique anglaise prenait son envol.
Serge Bouchard
Éphémères
Mes mots voyageurs ruissellent comme ceux d'une rivière. Comme le temps qui passe. Et la vie qui s'enfuit vers d'autres courants, d'autres libellules et d'autres improbables harmonies. Je ne sais pas s'ils rencontrent le soleil, le temps d'une éclaircie ou bien la pluie ou le vent ou ces éphémères qui hantent la surface de l'eau. Ou même s'ils vont vers la mer. J'aimerais bien, pourtant, qu'ils aillent vers la mer avec tous ces oiseaux aux ailes de géants qui peuplent encore mes rêves.
Emile Castillejos
Peinture et sensation
Il y a deux manières de dépasser la figuration (c’est-à-dire à la fois l’illustratif et le narratif) : ou bien vers la forme abstraite, ou bien vers la Figure. Cette voie de la Figure, Cézanne lui donne un nom simple : la sensation. La Figure, c’est la forme sensible rapportée à la sensation ; elle agit immédiatement sur le système nerveux, qui est de la chair. Tandis que la forme abstraite s’adresse au cerveau, agir par l’intermédiaire du cerveau, plus proche de l’os. Certes Cézanne n’a pas inventé cette voie de la sensation dans la peinture. Mais il lui a donné un statut sans précédent. La sensation, c’est le contraire du facile et du tout fait, du cliché, mais aussi du « sensationnel », du spontané, etc. La sensation a une face tournée vers le sujet (le système nerveux, le mouvement vital, « l’instinct », le « tempérament », tout un vocabulaire commun au Naturalisme et à Cézanne), et une face tournée vers l’objet (« le fait », le lieu, l’événement) Ou plutôt elle n’a pas de face du tout, elle est les deux choses indissolublement, elle est être-au-monde, comme disent les phénoménologues : à le fois je deviens dans la sensation et quelque chosearrive par la sensation, l’un par l’autre, l’un dans l’autre. Et à la limite, c’est le même corps qui la donne et qui la reçoit, qui est à la fis objet et sujet. Moi spectateur, je n’éprouve la sensation qu’en entrant dans le tableau, en accédant à l’unité du sentant et du senti. La leçon de Cézanne au-delà des impressionnistes : ce n’est pas le jeu « libre » ou désincarné de la lumière et de la couleur (impressions) que la Sensation est, au contraire c’est dans le corps, fut-ce dans le corps d’une pomme. La couleur est dans le corps, la sensation est dans le corps, et non dans les airs. La sensation, c’est ce qui est peint. Ce qui est peint dans le tableau, c’est le corps, non pas en tant qu’il est représenté comme objet, mais en tant qu’il est vécu comme éprouvant telle sensation (ce que Lawrence, parlant de Cézanne, appelait l’ « être pommesque de la pomme »).
Gilles Deleuze, Extrait de Francis Bacon: Logique de la sensation
samedi 8 août 2015
Lire
Livrées à la hâte et à la facilité de vivre extérieurement, les époques heureuses sont infidèles à la pensée écrite. Une molle félicité excella toujours à brûler les heures, à les presser de témoigner combien elles sont vides, vaines, volantes. De poignants soucis, une tardive clairvoyance leur redonnent leur poids et leur suc, réduisent à leur valeur les plaisirs qui nous viennent du son et des fuyantes images. Ce qui se fixe en nous par l'œil, ce qui par le caractère imprimé réchauffe en nous la pensée, l'esprit de compréhension et de contradiction, prend tout son prix ; n'est-il pas de meilleures augures que des générations égarées, en cherchant leur voie, retrouvent que lire est un bonheur vital ?
Colette, Paris de ma fenêtre (1942), dans Œuvres IV
vendredi 7 août 2015
We, stones, were branded by hot iron
We, stones, were branded by hot iron
our eyes scorched
we saw through an inverted gaze
black holes
swallowing us in infinity
death cuddling our misfortune
his dog licking our wounds
spitting
our lacerated conscience
already the flavor of the earth was not the same
fruits fell before they ripened
we were growing clandestinely
drop by drop within the caves
it was in this way that the silence of the great beginning engulfed us
our eyes scorched
we saw through an inverted gaze
black holes
swallowing us in infinity
death cuddling our misfortune
his dog licking our wounds
spitting
our lacerated conscience
already the flavor of the earth was not the same
fruits fell before they ripened
we were growing clandestinely
drop by drop within the caves
it was in this way that the silence of the great beginning engulfed us
***
From Sing: Poetry from the Indigenous Americas (University of Arizona Press, 2011).
Translated from the Spanish by Gloria E. Cachón.
***
Rosa Chávez is a member of the Maya K’iche tribe on her father’s side and the Maya Kaquiquel on her mother’s side. She was born in Guatemala in 1980. In addition to being a poet, she’s an actress and cultural committee member. Rosa Chávez has been invited to share her work at various literary event and festivals in Mexico, El Salvador, Costa Rica, Venezuela, Colombia, Chile, Peru, and Argentina. Publications include Casa solitaria, published in Guatemala in 2009;PIEDRA, published in Costa Rica in 2009; and Los dos corazones de Elena Kame, published in Argentina in 2009.
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