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lundi 5 novembre 2018

Amérique étrangère

Je suis un homme de mes terres Amérique
Je les porte pesantes
pavés de glaise
grisou d'exil
Je les portes je me sépare je me cogne à ta poutre
Amérique
Je devrai me ruer contre tous les salpêtres et tous bois ternis de mon sang
Je devrai me jeter flèche sur les cris de mon passé et sur mes reniements
Et je briserai les abres tenant encore la rengaine de ce coeur
Et je lancerai la hache sur moi-même et me retrouverai
À nouveau crée pour la troisième fois de ma vie
Et je serai le soc et la main qui le plante
Et moi-même l'épaule et l'épaulement
Je rongerai le tremble de mes landes charnelles
Je mangerai l'écorce et la racine de vieux mal de terre et je déterrerai les paroles de feu
Je flotterai fleuve de liège flamme d'algue j'évoluerai dans le vertige
Je serai ciel des épaisseurs mouvantes et roc primaire sous les pierres du vent
Je serai l'os de la rouille et je naîtrai forme et substance de craie au pays de la craie
de la craie des visages sans air
de la craie des neiges oubliées
des bouches gelées
des peaux froides et du feu sous la peau
de la cendre explosée
de la craie des ruelles amorties d'odeurs fauves
de la craie des gratte-ciel
gris sur froid
bleu sur fer
de la craie des arbres plantés droit
douilles perdues qui n'ont pas percuté
de la craie d'Amérique
Amérique à peau double ma lutte
terne et mauve amérique serpent
de poivre de glace ma violence
Amérique à peau neuve mon cancer et mon double
Et ma drogue
qui creuse la main du dernier cri
Michel Van Schendel, Extrait De l'oeil et de l'écoute

2 commentaires:

  1. bonjour , très beaux poème . bonne soirée a vous.

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    1. Merci de votre passage est bienvenue. C'est vrai que la poésie de Van Schendel est belle. Bonne soirée à vous.

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