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mercredi 30 juillet 2014

Ancre


Rouge

C’est LA couleur, le blanc représente l’incolore, et le noir le « sale » dans l’antiquité. Les pigments rouges sont très vite maîtrisés (dans l’art paléolithique), au néolithique on se sert de :

- la garance
- l’oxyde de fer
- le sulfure de mercure

Depuis des époques très anciennes, la couleur rouge a été en Occident associée à la mise en scène du pouvoir et du sacré, celle du sang et du feu, celle de la vie et de la vigueur, celle de l’autorité et de la beauté.

C’est une couleur ambivalente : À l’époque romaine, le rouge, qui est à la fois la couleur de la guerre et celle de l’empire, participe à toutes les victoires et solennités. 

Il y a plusieurs façons d’obtenir du rouge : 

Plus facile à obtenir avec la garance, ce rouge moins vif est réservé au manteau des légionnaires, aux paysans. 

Obtenu à partir du murex (coquillage), plus vif, plus rare, il symbolisera la puissance de l’empereur romain, des seigneurs au Moyen Age. Au 13ème et 14ème, il sera utilisé pour parer le Pape et les cardinaux.

L’ambivalence du rouge apparaît en même temps dans la représentation du diable rouge et du chevalier félon rouge. Le code symbolique rouge-noir-blanc du moyen âge est présent dans les contes, les fables : 

Petit chaperon rouge, beurre (blanc), grand-mère habillée de noir.
Pomme rouge/ Blanche-Neige/ sorcière noire
Renard / fromage/ corbeau

Au Moyen Âge, le bleu est féminin, le rouge est masculin, cette tendance s’inverse au 16ème siècle. 

La robe de mariée est rouge jusqu’au 19ème siècle. 

Dès le 18ème, le rouge est associé au danger : la robe des juges est rouge, le bourreau aussi. En 1789, le drapeau rouge signifiait l’interdiction d’attroupement.

Il est aussi associé au plaisir et au spectacle avec son célèbre rideau rouge.

Michel Pastoureau & Dominique Simonnet, Extrait du Petit livre des couleurs

mardi 29 juillet 2014

Toréador en garde


Vert

Jusqu’au 17ème, c’est une couleur excentrique, elle a un caractère transgressif et turbulent

C’est une couleur peu compliquée à obtenir mais chimiquement instable. On l’associe au poison (lié au procédé chimique) et c’est le vert qui passe en premier sur les photos anciennes. C’est donc la couleur de l’instabilité, liée au hasard, au jeu, au destin (on ne savait jamais si elle allait perdurer ou se décomposer), à la finance (couleur du dollar).

Elle est censée porter malchance au théâtre (dans la composition du maquillage des comédiens, l’acide borique était hautement toxique et la légende prétend que Molière est mort en habit vert)

Avant le 17ème siècle, on n’obtient pas le vert par mélange (interdit du moyen âge). C’est au 18ème qu’apparaissent les couleurs primaires et complémentaires.

Jusqu’au 18ème, seuls les 4 éléments évoquaient la nature. C’est le Romantisme qui associe le vert à la nature. La croix verte des pharmacies évoquant la médecine par les plantes a actuellement tendance à devenir bleue, couleur de la technologie.

Au 19ème, en opposition au rouge, elle symbolise la permissivité (actuels feux de signalisation), la sécurité.

Elle évoque à présent la propreté, la pureté : les produits verts prétendent respecter l’environnement. La couleur verte est aussi choisie pour tout produit dont on veut vanter la fraîcheur : la menthe naturellement blanche est devenue verte.

Michel Pastoureau & Dominique Simonnet, Extrait du Petit livre des couleurs

Géode d'agate


samedi 26 juillet 2014

Dame de Nubie


Linéarité

Si on se donne une lumière blanche pour effectuer des comparaisons, on constate que l'addition, en proportions appropriées, de deux lumières monochromatiques, donne une lumière métamère de la lumière blanche. Quand cela est possible, on dit qu'elles sont complémentaires. Cette propriété dépend de la lumière blanche qu'on a choisie. Deux lumières complémentaires par rapport un blanc obtenu par l'illumination d'une feuille par une bougie ne le sont pas par rapport à un blanc obtenu par la lumière du jour.

On vérifie que cette propriété se maintient si on multiplie l'intensité de toutes les composantes par la même quantité. Si on augmente d'une certaine intensité une des deux complémentaires, on vérifie que le résultat est une lumière métamère de la lumière blanche plus quantité de lumière monochromatique qui a été ajoutée. Cette linéarité va permettre d'effectuer des calculs sur les intensités.

Wild Is The Wind

Magenta

Le magenta est la teinte de l'un des premiers colorants à base d'aniline, découvert en 1858 par Natanson. C'est un colorant rouge violacé devenu la référence pour la couleur rouge primaire. Il fut nommé magenta en commémoration de la bataille de Magenta en Italie cette année-là.

Il fut remplacé dans les années 1950 par les pigments organiques de synthèse de la famille des quinacridones. La teinte magenta proprement dite est obtenue avec le rouge de quinacridone (PV19), qui a une tendance légèrement bleue. Lui-même a deux nuances distinctes : claire (rouge rosé) et foncée (rouge violet). On peut aussi utiliser le rose de quinacridone (PV42) ou le magenta de quinacridone (PR122), plus vifs et à tendance plus rouge.

vendredi 25 juillet 2014

Five of Swords


Le triangle du feu

La combustion est une réaction chimique dégageant de la chaleur (exothermique) et de la lumière. C'est aussi la dégradation visible d'une matière. Elle ne peut avoir lieu que si l'on réunit trois facteurs : deux composés chimiques (un combustible et un comburant) et une source d'énergie (énergie d'activation), ce que l'on appelle le triangle du feu. En terme général, le feu est déclenché par une flamme et / ou une étincelle, eux-mêmes déclenchés par une réaction chimique entre deux ou plusieurs corps. Sous l'effet de l'énergie d'activation (notamment de la chaleur), le combustible se décompose (pyrolyse), le produit de cette décomposition est un gaz qui réagit avec le comburant (en général le dioxygène de l'air). Ainsi, nous pouvons résumer le processus suivant par la formule suivante : combustible + chaleur + dioxygène = feu. Le feu peut avoir plusieurs couleurs selon la chaleur qu'il dégage. Ces couleurs varient du bleu (très chaud : ~ 2 000 °C) au rouge (chaud : ~ 1 000 °C).

La lumière provient de deux sources : d'une part des échanges d'électrons entre les composés au cours de la réaction chimique ; d'autre part le rayonnement qu'émet tout corps porté à haute température (rayonnement du corps noir).

jeudi 24 juillet 2014

Les trois Moires


Il faut créer, bien plus que lutter

«La création est plus forte que la lutte, puisqu’elle n’a pas besoin de violence, plus juste, puisqu’elle n’impose rien, plus riche, puisqu’elle produit au lieu de détruire, plus existante, enfin, puisqu’elle évite de provoquer, en elle comme hors d’elle, le moindre néant. La création, seule, permet de renoncer à la tentation du néant : celle d’un recours au néant pour lutter contre le néant. Or anéantir le néant serait le faire triompher. Il ne faut nul néant, nul contact avec le néant, telle est la devise de l’existence, possible par la création. Il ne faut et on peut ne rien supprimer, puisque créer suffit à périmer. Créer, c’est être le passeur, celui par qui le passé passe.»

samedi 19 juillet 2014

Southern United States

Le bain de temps

«Le bain de temps est une pièce anodine. Rien ne la distingue d’une autre. Certains sont des pièces désuètes, comme des chambres où rien n’aurait changé depuis vingt ans. D’autres sont en désordre, comme des chambres d’enfant.

Certains bains de temps sont des salles de café. Certains, implantés dans les écoles, sont en forme de salle de classe.

L’idée veut que le temps s’y déroule autrement. Dans certains, le temps va deux fois plus vite. Dans d’autres, il coule à l’envers. J’en connais un, très couru, où les secondes se présentent dans le désordre.

Mais ils ne sont pas faciles à trouver, car ils se déplacent souvent. Et alors on les perd, sauf si l’on se trouve dedans. J’avais un bon bain de temps juste à l’entrée d’un bar. Mais il a disparu, et je ne l’ai jamais retrouvé. Le temps y avait la dernière saveur de la menthe à l’eau lorsque la paille où l’on aspire finit par trouer le glaçon.»

Six of Wands


jeudi 17 juillet 2014

De ce qui est précaire

La seule manière de se sortir de l'état de précarité, c'est de s'en remettre aux minutes qui s'écoulent. Je peux dire par mon expérience de ces dernières années que l'angoisse côtoie la grâce, aussi surement que le blanc longe le noir. Que la liberté est un lieu que nous expérimentons à petite dose.

mardi 15 juillet 2014

Bleu outremer

«Le bleu outremer a été, de tous temps, très prisé en peinture mais jusqu'au xixe siècle, il était extrêmement cher. Au Moyen Âge, l'outremer véritable valait plus cher que l'or. Le lapis-lazuli, à l'origine de sa confection était importé d'Afghanistan d'où son nom, du latin ultramarinus, « au-delà des mer ».

L'outremer de synthèse (PB29) fut mis au point au début du XIXe siècle lorsque l'industrie européenne chercha à s'affranchir de l'importation d'indigotier depuis les Indes. En 1824, la Société d'Encouragement pour l'Industrie Nationale décida d'offrir une récompense de 6000 francs à celui qui découvrirait un moyen permettant de fabriquer la couleur artificiellement.

Nicholas Clément et Charles Desormes avaient, par analyse chimique, montré dès 1806 que les silicates d'alumine entraient naturellement dans la composition du lapis-lazuli naturel.

Les industriels cherchèrent à synthétiser ce composé chimique à partir de l'argile, qui contient également des silicates d'alumine. Des résultats concluants furent obtenus indépendamment et presque simultanément par l'industriel lyonnais Jean-Baptiste Guimet (1826), qui reçut la récompense sur présentation officielle de sa découverte, en 1828, année où le chimiste allemand Christian Gottlob Gmelin publiait ses travaux. Guimet créa en 1831, à Fleurieu-sur-Saône, sa fabrique industrielle de bleu d’outremer. La technique consiste à chauffer à plusieurs centaines de degrés un mélange d'argile, de soude caustique (pour l'apport de sodium) et de charbon. La réputation du Bleu Guimet devient mondiale par son utilisation dans les peintures, l’azurage du papier et du linge (notamment dans les lessives et boules à raviver le blanc dans lesquelles se trouvent les grains bleus), la fabrication de papiers peints, encres d’imprimerie, cuirs, revêtements de sols, ciments, caoutchoucs, matières plastiques, savons, apprêts, cachets et onguents contre les affections respiratoires et toutes couleurs pour artistes.»

Summerhead

dimanche 13 juillet 2014

Chevelure sylphe


Je suis

«Gloire à la vieille baille aux cerceaux rouillés! Elle est pleine jusqu'aux bords d'une pluie dont la surface est un miroir. D'abord, je cueille du bout des lèvres, sans rien troubler, les gouttes de pluie entassées. Je me vois, dans l'eau tiède que j'aspire, l'aspirer; et c'est comme si je l'aspirais de l'intérieur de mon visage. Puis j'en ai assez de me priver; j'ouvre grand la bouche et plonge toute ma tête. C'est trop bon: j'avale avec volupté, comme des morceaux de sucre, les mouches et les papillons noyés. Survenant hypocritement par-derrière, Asie Azothe me saisit par le gorge et cherche de toute sa force à tenir ma tête immergée. Je perds momentanément mes forces, puis me redresse et me retourne. Elle porte sa robe des dimanches. Je prends une pleine brassée de l'eau de pluie et la lui lance. Elle fait de même. À la fin, ce sont des rivières entières que nous prenons dans nos bras et nous lançons à la figure. Nous coupant le souffle chaque fois, les masses d'eau éclatent comme des feux d'artifice sur nos visages. Soudain, Asie Azothe crie et se sauve. Je coura après elle et la projette violemment sur le sol. Nous nous battons comme des ballons. Je la mords et la griffe au sang pour qu'elle me morde et me griffe au sang. Trop petite tête, elle ne comprend pas. Voyant que je lui fait mal exprès, elle se met à pleurer. La bataille est finie. Toute chose finit par finir. Jusqu'à quelle heure, sainte Iode, devrai-je attendre pour trouver autre chose d'intéressant à faire? Sainte Iode est ma patronne. Elle n'est pas morte vierge et martyre, mais crotté et vampire. Nous étions: c'est fini; maintenant: nous sommes. Nous sommes tout le temps; mais nous ne sommes pas longtemps. Nous sommes que le temps de le dire; on dit «Je suis» et déjà ce qu'on a été qui a dit «Je suis» n'est plus.»

Réjean Ducharme, Océantume

Cycle de l'Invisible


Aucun centre

«L'histoire de ma vie n'existe pas. ça n'existe pas. Il n'y a jamais de centre. Pas de chemin, pas de ligne. Il y a de vastes endroits où l'on fait croire qu'il y avait quelqu'un, ce n'est pas vrai il n'y avait personne.»

Marguerite Duras, L'amant

samedi 12 juillet 2014

Décompte des irréductibles


En nous

«Pour écrire un seul vers, il faut avoir vu beaucoup de villes, d’hommes et de choses, il faut connaître les animaux, il faut sentir comment volent les oiseaux et savoir quel mouvement font les petites fleurs en s’ouvrant le matin. Il faut pouvoir repenser à des chemins dans des régions inconnues, à des rencontres inattendues, à des départs que l’on voyait longtemps approcher, à des jours d’enfance dont le mystère ne s’est pas encore éclairci, à ses parents qu’il fallait qu’on froissât lorsqu’ils vous apportaient une joie et qu’on ne la comprenait pas (c’était une joie faite pour un autre), à des maladies d’enfance qui commençaient si singulièrement, par tant de profondes et graves transformations, à des jours passés dans des chambres calmes et contenues, à des matins au bord de la mer, à la mer elle-même, à des mers, à des nuits de voyage qui frémissaient très haut et volaient avec toutes les étoiles – et il ne suffit même pas de savoir penser à tout cela. Il faut avoir des souvenirs de beaucoup de nuits d’amour, dont aucune ne ressemblait à l’autre, de cris de femmes hurlant en mal d’enfant, et de légères, de blanches, de dormantes accouchées qui se refermaient. Il faut encore avoir été auprès de mourants, être resté assis auprès de morts, dans la chambre, avec la fenêtre ouverte et les bruits qui venaient par à-coups. Et il ne suffit même pas d’avoir des souvenirs. Il faut savoir les oublier quand ils sont nombreux, et il faut avoir la grande patience d’attendre qu’ils reviennent. Car les souvenirs ne sont pas encore cela. Ce n’est que lorsqu’ils deviennent en nous sang, regard, geste, lorsqu’ils n’ont plus de nom et ne se distinguent plus de nous, ce n’est qu’alors qu’il peut arriver qu’en une heure très rare, du milieu d’eux, se lève le premier mot d’un vers.»

Rainer Maria Rilke, Extrait de Les Cahiers de Malte Laurids Brigge

jeudi 10 juillet 2014

Fée des dents


La pensée

« Toute la question est précisément de savoir si la pensée aussi n’est pas mieux n’importe où que dans le milieu d’une forêt. Ce que je dis, c’est que justement parce que sa morale était provisoire, justement parce qu’elle n’entrait pas dans son système, parce qu’elle n’était pas arrêtée, parce que pour ainsi dire elle n’était pas officielle, justement parce qu’il s’y est moins défendu, moins observé, c’est elle qui nous livre son secret. Son secret c’est bien d’aller toujours dans le même sens et, le soir, d’arriver quelque part.

Toute la question est en effet de savoir si la pensée elle-même n’entre point dans de certaines conditions, si elle n’est point soumise à de certaines conditions générales de l’homme et de l’être, qui sont des conditions organiques, et dont l’une précisément serait que tout vaut mieux que de tourner en rond.

Partir, marcher droit, arriver quelque part. Arriver ailleurs plutôt que de ne pas arriver. Arriver où on n’allait pas plutôt que de ne pas arriver. Avant tout arriver. Tout, plutôt que de vaguer. Et que la plus grande erreur c’est encore d’"errer" : voilà sa nature même et la race de son secret. »

Charles Péguy, Note sur M. Bergson (1914)

mercredi 9 juillet 2014

Somewhere in Between



We went up to the top of the highest hill
And stopped still, it was just so beautiful
It was just so beautiful, it was just so beautiful

This is where the shadows come to play
'Twixt the day and night, dancing and skipping
Along a chink of light

Somewhere in between, the waxing and the waning wave
Somewhere in between, what the song and silence say
Somewhere in between, the ticking and the tocking clock

Somewhere in a dream between, sleep and waking up
Somewhere in between, breathing out and breathing in
Like twilight is neither night nor morning

Not one of us would dare to break the silence
Oh, how we have longed for something
That would make us feel so

Somewhere in between, the waxing and the waning wave
Somewhere in between, the night and the daylight
Somewhere in between, the ticking and the tocking clock

Somewhere in between, what the song and silence say
Somewhere in between, breathing out and breathing in
Goodnight sun, goodnight sun, goodnight mum

La mémoire des pierres


Porter sa croix

« L'histoire est essentiellement longitudinale, la mémoire est essentiellement verticale. L'histoire consiste essentiellement à passer au long de l’événement. La mémoire consiste essentiellement, étant dedans l’événement, avant tout à n'en pas sortir, à y rester et à le remonter en dedans. La mémoire et l'histoire forment un angle droit. L'histoire est parallèle à l’événement, la mémoire lui est centrale et axiale. »

Charles Péguy, Extrait de Dialogue de l'histoire et de l'âme païenne

lundi 7 juillet 2014

Memengwesiwag


La théorie des sympathies

"Le minéral donne et la plante reçoit. Les astres donnent et les fleurs reçoivent. Le ciel donne et la terre reçoit. Tout s'enlace et tout se déplace. Tout se mélange et tout se recompose. Tout se mêle et tout se démêle. Chaque chose se fait selon une méthode. Sans méthode la combinaison et la décomposition de toutes choses et la connexion de l'ensemble ne se produisent pas. La méthode est conforme à la nature, donnant et enlevant le souffle, et conservant ses ordonnances en les accroissant et en y mettant fin. Et en s'accordant par la séparation et l'union, toutes les choses, pour dire bref, si la méthode est bien respectée, transmutent la nature. Car la nature retournée se retourne elle-même. Tel est le caractère de l'excellence de tout l'univers et sa connexion"

Zosime de Panopolis

Le serpent d'eau


dimanche 6 juillet 2014

Entrer dans la mer

“A Neauphle, souvent, je faisais de la cuisine au début de l’après-midi. Ça se produisait quand les gens n’étaient pas là, qu’ils étaient au travail, ou en promenade dans les Étangs de Hollande, ou qu’ils dormaient dans les chambres. Alors j’avais à moi tout le rez-de-chaussée de la maison et le parc. C’était à ces moments-là de ma vie que je voyais que je les aimais et que je voulais leur bien. Le sorte de silence qui suivait leur départ je l’ai en mémoire. Rentrer dans ce silence c’était comme entrer dans la mer. C’était à la fois un bonheur et un état très précis d’abandon à une pensée en devenir, c’était une façon de penser ou de non-penser peut-être, – ce n’est pas loin – et déjà, d’écrire”.

Marguerite Duras, Extrait de La Vie matérielle

Shiva Shakti


Shakti

Shakti ou śakti (devanāgarī : शक्ति) est un terme sanskrit qui signifie « pouvoir », « puissance », « force ». C'est également le nom de l'épouse d'Indra, dieu d'un paradis-univers (loka) chez les hindous.

Shakti est un concept d'une divinité représentant la puissance féminine créatrice. Elle représente la Grande Mère divine et la puissance de la fécondité. Par extension, la shakti désigne l'énergie dynamique féminine, ou principe actif, des divinités du panthéon indien, le principe mâle devenant passif dans son rôle de semence ou d'essence. Ceci est à mettre en corrélation avec la dualité Puruṣa/Prakriti de la philosophie du Sāṃkhya.

Dans le tantrisme, la shakti est identifiée à la Kuṇḍalinī, déesse-serpent existant dans le corps de chaque être humain à la base du sacrum, et dont l'éveil prélude à la délivrance, moksha, par son union à Shiva à la pointe du crâne. Dans ce contexte, certaines upaniṣad la décrivent comme parèdre de Shiva. Pour certaines chakras elle est l'énergie féminine manifestée, complété par la puissance masculine de Shiva.

Le foyer de nos pensées


Au bord de la mer

Vois, ce spectacle est beau. - Ce paysage immense
Qui toujours devant nous finit et recommence ;
Ces blés, ces eaux, ces prés, ce bois charmant aux yeux ;
Ce chaume où l'on entend rire un groupe joyeux ;
L'océan qui s'ajoute à la plaine où nous sommes ;
Ce golfe, fait par Dieu, puis refait par les hommes,
Montrant la double main empreinte en ses contours,
Et des amas de rocs sous des monceaux de tours ;
Ces landes, ces forêts, ces crêtes déchirées ;
Ces antres à fleur d'eau qui boivent les marées ;
Cette montagne, au front de nuages couvert,
Qui dans un de ses plis porte un beau vallon vert,
Comme un enfant des fleurs dans un pan de sa robe ;
La ville que la brume à demi nous dérobe,
Avec ses mille toits bourdonnants et pressés ;
Ce bruit de pas sans nombre et de rameaux froissés,
De voix et de chansons qui par moments s'élève ;
Ces lames que la mer amincit sur la grève,
Où les longs cheveux verts des sombres goëmons
Tremblent dans l'eau moirée avec l'ombre des monts ;
Cet oiseau qui voyage et cet oiseau qui joue ;
Ici cette charrue, et là-bas cette proue,
Traçant en même temps chacune leur sillon ;
Ces arbres et ces mâts, jouets de l'aquilon ;
Et là-bas, par-delà les collines lointaines,
Ces horizons remplis de formes incertaines ;
Tout ce que nous voyons, brumeux ou transparent,
Flottant dans les clartés, dans les ombres errant,
Fuyant, debout, penché, fourmillant, solitaire,
Vagues, rochers, gazons, - regarde, c'est la terre !

Victor Hugo, Extrait de Au bord de la mer

mercredi 2 juillet 2014

D7X8M


L’espace intersubjectif

L’immobilité, c’est la mort. Donc, quand on aborde l’art chinois, même si ses images offrent le même mutisme et la même immobilité plastique qu’une image occidentale, il faut les comprendre dans l’espace topologique où elles ne cessent d’être animées par le sens qu’on leur donne, par la circulation des gestes qui leur ont donné naissance, par la modification et la contradiction du sens et par le fait qu’une image peut toujours dire une chose et son contraire, se retourner et se déployer. Et que dans l’espace intersubjectif qui sépare celui qui fait l’image de celui à qui il la montre, se joue encore tout un jeu. Il ne faut pas remplir ce vide.

Marie-José Mondzain, Extrait de Qui refuse l'économie refuse l'iconimie
La voix du regard N° 14, automne 2001