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lundi 22 juin 2015

La grande marée

Un colosse aux pieds d'argile surveille la frontière. Des gosses aux mains fragiles jouent avec la poussière. Des veuves aux longs doigts fébriles distillent le thé. Un vieillard au regard tranquille sort de la fumée. Un roi perclus de solitude sur son trône dérisoire. Un café, une pendule, un bout de trottoir. Un réveil sinistre et drôle sur l'épaule d'un ouvrier qui s'en va au bout du môle, vers l'éternité Les enfants qui jouent à l'ombre des matraques. Le temps qu'il fait, six mois de prison à Maniac. Une étoile est tombée dans ma guitare. Si j'étais croyant, ce serait un don du ciel. Les rues n'ont plus de recoins, plus d'angles morts, ça facilite les rapports de force. Il n'y a plus d'amoureux, plus de bancs publics. Nous sommes éternellement bronzés. Notre vocabulaire est réduit à 50 mots. Nous branchons nos sexes dans le secteur et nos spermatozoïdes sont calibrés et placés dans des banques. Ils servent de monnaie d'échange aux eunuques qui nous gouvernent. Notre société d'abondance fait merveille, il n'y a plus qu'un classe, quoiqu'en y réfléchissant bien il y en a une autre mais il est déconseillé de réfléchir. Nous ne faisons plus jamais l'amour, sauf de temps en temps avec les gardiens qui nous surveillent. Le mien est frigide. C'est la grande marée, la grande marée, la grande marée. La grande marée, la grande marée, la grande marée...

Bernard Lavilliers

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