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vendredi 4 octobre 2019

Rien

Te t’inquiète pas, mon enfant, il n’y a rien,
tout est comme tu vois : la forêt, la fumée, la fuite des rails.
Quelque part, là-bas, dans un pays lointain,
il y a un ciel plus bleu et un mur couronné de roses
ou un palmier et un vent plus doux –
et c’est tout.
Il n’y a rien que la neige sur la branche du sapin,
il n’y a rien à baiser de ses lèvres chaudes,
toutes les lèvres deviennent froides, avec le temps.
Mais tu dis, mon enfant, que ton cœur est fort
et que vivre pour rien, c’est pire que mourir.
Que lui voulais-tu à la mort ?
Ne sens-tu pas le dégoût que dégagent ses frusques ?
Rien n’est plus écœurant que de mourir de sa propre main.
Comme ces courts instants où fleurit le désert,
nous devons aimer les longues heures de maladie de la vie
et les années contraintes où se concentre le désir.

Edith Södergran, Extrait de Le pays qui n'est pas et Poèmes

jeudi 3 octobre 2019

Grands vents

C'étaient de très grands vents, sur toutes faces de ce monde,
De très grands vents en liesse par le monde, qui n'avaient d'aire ni de gîte,
Qui n'avaient garde ni mesure, et nous laissaient, hommes de paille,
En l'an de paille sur leur erre... Ah ! oui, de très grands vents sur toutes faces de vivants !
Saint-John Perse, Extrait de Vents / Chronique / Chant pour un équinoxe

mercredi 25 septembre 2019

Nameless

Une Voix sans personne

« Le rôle du poète n'est-il pas de donner la vie à ce qui se tait dans l'homme et dans les choses, puis de se perdre au coeur de la Parole?

Cette parole qu'un peuple d'ombres se transmet d'une rive à l'autre du temps, il semble qu'une seule voix sans fin la porte et la profère.

Elle seule, dépositaire d'un monde de secrets, tire de notre absence une longue mémoire, dessine dans l'espace la figure de l'Homme et prête à nos hasards la forme du destin...

Mais peut-être, au delà d'elle-même, si nous prêtons l'oreille avec plus de ferveur, pourrons-nous percevoir l'écho de ce qui n'a même plus de nom dans aucune langue. 

Les paroles, alors, qu'elle soient transparentes ou opaques, humbles ou chamarées d'images, ne contiendront pas plus de sens qu'un soufffle sans visage qui résonnerait pour lui-même sur les débris d'un temple ou dans un champ superbement désert depuis toujours ignorés des humains.

Ainsi, qu'il laisse un nom ou devienne anonyme, qu'il ajoute un terme au langage ou qu'il s'éteigne dans un soupir, de toute façon le poète disparaît, trahi par son propre murmure et rien ne reste après lui qu'une voix — sans personne. »

Jean Tardieu, Extrait de Une Voix sans personne

jeudi 20 juin 2019

Espoir fébrile

Bruissement des racines
aux lésions des pierres
le vent s'est arrêté
et nous avons pu entendre
la rumeur languissante des eaux
dans les maillles de la lumière
Et traduire seulement
le déroulement de la lumière
les terres ondulaient des mêmes changements ténus
seul s'écoulait
l'accoutumier transbordement
de nos peines journalières
dans l'espoir fébrile des paysages
Marie Uguay, Extrait de Signe et rumeur

Le chant du merle

Le chant du merle

mercredi 19 juin 2019

L'eau cachée des origines

« Les deux faces de l'agate sont également polies et du même bleu nocturne. Elles offrent un miroir identique, chargé de présages et d'invectives. Entre elles, qui semble en garantir la terrible promesse, l'eau cachée des origines dont on voit l'ombre se déplacer et dont l'oreille entend le clapotis. Je crois que nul ne reste insensible à l'émotion qu'engendre pareille présence. Ce vase le plus clos jamais ne fut ouvert. Il ne fut même pas soudé à sa naissance, comme ampoule de verre. Un vide s'y creusa de lui-même au cœur de la masse. Nul ni nulle force n'y fit pénétrer le fluide incorruptible qu'il contient et qui, depuis lors, demeure impuissant à s'en échapper comme à s'y dessécher.

Le vivant qui le regarde comprend qu'il n'est, pour sa part, ni si durable ni si ferme. Ni si agile ni si pur. Il se connaît sans joie à l'extrémité d'un autre empire, et soudain si étranger à l'univers : un intrus hébété. Je ne devine que trop, par obsession personnelle, quelles méditations, du moins quelles rêveries vagues, un passager du monde peut commencer de dévider à partir de ces cailloux hantés d'une liqueur, un peu d'eau géologique restée prisonnière dans la poche transparente d'une pierre hermétique. »

Roger Caillois, Extrait de Pierres

Parc de la Rivière-des-Mille-Îles

S/T

vendredi 31 mai 2019

Au début ou à la fin

« Les poètes se révèlent pour la plupart au début ou à la fin d'une ère. C'est par des chants que les peuples quittent le ciel de leur enfance pour entrer dans la vie active, dans le règne de la civilisation. C'est par des chants qu'ils retournent à la vie primitive. L'art est la transition de la nature à la civilisation, et de la civilisation à la nature . » 

Friedrich Hölderlin 

mercredi 29 mai 2019

Le geste en photographie

« Aucun doute: l'invention de la photographie est arrivée comme un pocédé révolutionnaire, car c'est une méthode qui vise à fixer des sujets qui existent dans l'espace-temps de quatre-dimensions, sur une surface de deux dimensions. Cette méthode est révolutionnaire parce que, contrairement à la peinture, elle permet aux sujets eux-mêmes de s'imprimer sur une surface. Une photographie est une espèce « d'empriente digitale » que le sujet laisse sur une surface et non, comme la peinture, une représentation. Le sujet est la cause de la photographie et la signification de la peinture. Ce procédé révolutionnaire renverse le rapport existant entre le phénomène concret et l'idée que nous en avons. Dans la peinture c'est nous-mêmes qui formons une idée afin de saisir le phénomène sur une surface. Dans la photographie, c'est le phénomène qui génère sa propre idée pour nous sur une surface. En fait: l'invention de la photographie est une solution technique retardée de la querelle théorique qui existait entre l'idéalisme rationnaliste et l'idéalisme empirique. »

Vilém Flusser, Extrait de Les gestes

jeudi 23 mai 2019

The Birch Wood

Gustav Klimt

Déchiffrer les images

« Cet espace-temps propre à l'image n'est autre que le monde de la magie – monde où tout se répète et où toute chose participe à un contexte de signification. Pareil monde se distingue structurellement de celui de la linéarité historique, où rien ne se répète et où toute chose a des causes et aura des conséquences. Par exemple, dans le monde historique, le lever du soleil est la cause du chant du coq, alors que dans le monde de la magie le lever du soleil signifique le chant du coq et le chant du coq signifie le lever du soleil. La signification des images est magique.

Pour déchiffrer les images, il faut prendre en compte leur caractère magique. Aussi est-il erronné de voir en elle des événements gelés ». Bien plutôt remplacent-elles les événements par des états de choses, qu'elle traduisent en scènes. La force magique des images se fonde sur leur qualité de surface; et c'est à la lumière de cette magie qu'il convient de considérer la dialectique qui est la leur, la contradiction qui leur est propre. »

Vilém Flusser, Extrait de Pour une philosophie de la photographie

jeudi 16 mai 2019

Le ciel ouvre le miroir

Le ciel ouvre le miroir

Surfaces signifiantes

« Les images sont des surfaces signifiantes. La plupart du temps, elles indiquent quelque chose qui se situe dans l'espace-temps « au dehors », et qu'en leur qualité d'abstractions (de réductions des quatres dimensions de l'espaces-temps au deux dimensions de la surface) elles sont censées nous rendre représentable. Appelons  » cette faculté spécifique d'abstraire des surfaces à partir de l'espace-temps pour ensuite les y reprojeter. Elle est la condition de toute production et de tout déchifrement d'images. En d'autres termes, elle est la faculté d'encoder les phénomènes en des symboles bi-dimensionnels et de lire ces symboles.  »

Vilém Flusser, Extrait de Pour une philosophie de la photographie

lundi 13 mai 2019

Un seul silence

Je ne comprends pas la distance.
Comment comprendre l’espace
qui me sépare de l’arbre,
si son écorce dessine les lignes
qui manquent à ma pensée.
Comment comprendre la parenthèse
qui va du nuage à mes yeux,
si les figures du vent
délient le temps serré de ma petite histoire ?
Comment comprendre le cri pétrifié
qui gèle toutes les paroles du monde,
si de même qu’il n’est qu’un seul silence
il n’est au fond qu’une seule parole ?
Je ne comprends pas la distance.
L’ultime preuve en est l’espace absurde
qui sépare en deux vies
ton existence et la mienne.
Roberto Juarroz, Extrait de Poésie verticale

jeudi 9 mai 2019

Des feuilles

Il ne suffit pas de lever les mains.
Ni de les abaisser
ou de dissimuler ces deux gestes
sous les embarras intermédiaires.

Aucun geste n'est suffisant,
même s'il s'immobilise comme un défi.

Reste une seule solution possible:
ouvrir les mains
comme si elles étaient des feuilles.

Roberto Juarroz, Extrait de Poésie verticale

jeudi 18 avril 2019

Office du plus noble

Neige, office lent du temps le plus noble,
du temps de neiger des fleurs soulevant les sols
et le pays remonte entre ses bordages blancs
pour entrer dans la primauté du temps d'écouter;
pâleur de la chair touchant l'os de toutes parts,
pâleur du sang dans cet ouragan doux de l'innoncence.
Voici la terre dans sa vêture vaste et voyante,
voici l'esprit dans l'exil extrême de la connaissance.
Neiges, alentissement de paroles dans les langes de songe,
sans image comme la mer, et sans écriture comme le ciels;
ensablement des feux originels par la gravité de la neige
comme une exultation dans la fraîcheur de la lucidité.
La terre est un champ de sarrasin sans odeur,
une mortalité royale remontée aux genoux
— si étroit l'enjeu de Dieu sous ses morts. —
Lente neige, pluie peuplée de papillons morts
pour le repos des paupières couvant des îles de feu;
transhumance de la lumière cherchant une incarnation
comme un amour touchant la surface et la marée des mains.
Saison silenciaire et l'invisible est un attouchement,
le pouvoir des paumes dans la chute noble du signe
et Dieu brille enfin dans cet or intime de l'esprit. 
Rina Lasnier, Extrait de L'arbre blanc

lundi 18 mars 2019

Vide et plein

«Le vide procède de l'évidement du plein comme le plein se trouve, en retour, évasé par le vide; bien loin donc de former deux qualités ou deux états opposés, séparés l'un de l'autre, vide et plein sont structurellement corrélés et n'existent que l'un par l'autre.»

François Jullien, Extrait de La grande immage n'a pas de forme ou du non-objet par la peinture

mercredi 27 février 2019

vendredi 15 février 2019

Sémaphore

II 
Signes, silence, fumées
Songe désert, page blanche
Sphère soudain pleine d'une solitude grumeleuse
comme on voit aux boules de verre où tourbillonnent
des astérisques d'ivoire
Moment d'extrême nudité sous le halo des réverbères
seuls signes au loin d'une humaine sollicitude
Les hurlements ne sont que les voix de chiens crevés
depuis longtemps quand au claquement d'une rafale
se lève la meute des longues années perdues au jour le jour
des gestes éperdus
Toute mouvance se givre et la durée, la durée se fige
au lac de la mémoire
Gilles Hénault, Extrait de Sé/ma/pho/re suivi de voyage au pays de la mémoire

mardi 12 février 2019

Sémaphore

Les signes vont au silence
Les signes vont au sable du songe et s'y perdent
Les signes s'insinuent au ciel renversé de la pupille
Les signes crépitent, radiations d'une essence délétère,
chimie de formes cinétiques, filigranes d'aurores boréales.
Et tout se tisse de souvenirs feuillus, des gestes palmés éventant l'aire des lisses liesses.
Les signes sont racines, tiges éployées, frondaisons de signaux dans le vent qui feuillette son grimoire.
C'est l'hiver et le pays revêt sa robe sans couture dans un grand envol de feuilles et de plumes, dans un geste de sorcier saluant les derniers spasmes de la flamme.
Sous la voussure du ciel
S'allume une bourrasque de sel
Signe d'un silence qui sourd du songe et de l'ennui
Le silence darde sa lance au coeur du paysage soudain cinglé de souffles véhéments et la tempête monte comme une écume de légende pour ternir les bagues de la nuit.
L'homme dans le mitan de son âge de sait plus de quelle rive lui vient la vie.
Gilles Hénault, Extrait de Sé/ma/pho/re suivi de voyage au pays de la mémoire

vendredi 1 février 2019

Au-delà de ses traits disctinctifs

« Plutôt que de figurer des états disctincts – à la fois tranchant et s'opposant : sous la pluie ou par beau temps – , le peintre chinois peint des modifications, ils saisit le monde au-delà de ses traits disctinctifs et dans son essentielle transition. Car l'un sous-entend l'autre alors même qu'ils s'excluent; et l'un est discrètement au travail quand l'autre va encore s'étalant. Derrière le rideau de pluie qui balaie l'horizon, on pressent déjà, à la luminosité qui point, que ce mauvais temps va se lever; et, de même, le temps clair n'est pas si longtemps sans laisser percevoir quelques signes précurseurs de son voilement. »

François Jullien, Extrait de La grande immage n'a pas de forme ou du non-objet par la peinture

lundi 28 janvier 2019

L'immatériel

L'immatériel

Une respiration

« Ce que cherche ma parole sans cesse interrompue, sans cesse insuffisante, inadéquate, hors d'haleine, n'est pas la pertinence d'une démonstration, d'une loi, mais la dénudation d'une lueur imprenable, transfixiante, d'une fluidité tour à tour bénéfique et ravageante. Une respiration. »

Lorand Gaspar, Extrait de Sol absolu et autres textes

mercredi 23 janvier 2019

Inhabitable

« Tout le monde parle de la disparition des espèces, mais le plus extrême, c’est que nous sommes peut-être en train de vivre notre propre disparition, pas dans le sens où la planète serait inhabitable, mais dans le sens où nos esprits et nos imaginaires seraient inhabitables. »

mercredi 16 janvier 2019

Du malheur seul je me sens solidaire

Je suis entré à la place du fauve dans la cage,
ai gravé mon terme et mon surnom au clou sur le bat-flanc,
vécu au bord de l'eau, joué à la roulette,
dîné avec le diable seul sait qui, en habit.
Du sommet d'un glacier j'ai contemplé le monde,
par trois fois j'ai coulé, deux fois on m'a ouvert.
Le pays qui m'avait nourri, je l'ai lâché.
Ceux qui m'ont oublié formeraient une ville.
J'ai parcouru la steppe pleine encore de la clameur du Hun,
porté ce qui est de nouveau à la mode,
semé le seigle, couvert de tôle noire l'aire à battre,
ne me suis abstenu que d'eau sèche.
Mes rêves font sa place à l'œil noir d'acier des gardiens,
j'ai dévoré le pain d'exil avec la croûte,
permis tous les sons à ma gorge, sauf le hurlement,
en suis venu au murmure. Maintenant j'ai quarante ans.
Qu'ai je à dire de la vie? Qu'elle fut longue.
Du malheur seul je me sens solidaire.
Mais tant qu'on ne m'a pas de terre comblé la bouche,
il n'en sortira que de la gratitude.
Joseph Brodsky, Extrait de Vertumne

lundi 14 janvier 2019

Les marais baltiques

« Je suis né, j'ai grandi dans les marais baltiques, près des grises vagues de zinc qui viennent toujours par deux, de là toutes les rimes, de là cette voix sourde qui se déroule entre elles comme un cheveu mouillé, s'il se déroule. Et, calé sur coude, la conque de l'oreille entend non le ressac, mais les claquements de toile, de volets ou de mains, de l'eau qui bout sur un réchaud, le cri des mouettes, tout au plus. Et sur ces étendues, c'est bien ce qui protège le cœur du faux-semblant - nulle part où se cacher, à perte de vue. Pour le son seulement l'espace est une entrave, l'œil ne se plaint jamais de l'absence d'écho. »

Joseph Brodsky, Extrait de Vertumne

dimanche 13 janvier 2019

Arbre qui parle

« Ce livre a la forme d'un arbre à cinq branches. Ses racines sont mentales et ses feuilles sont des syllabes. La première branche s'oriente vers le temps et cherche la perfection de l'instant. La deuxième parle avec les autres arbres, ses prochains lointains. La troisième se regarde sans se voir : la mort est transparente. La quatrième est une conversation avec des images peintes, la forêt " des vivants piliers ". La cinquième se penche vers une source et apprend les mots du commencement. »

Octavio Paz, Extrait d'Octavio Paz Oeuvres

samedi 12 janvier 2019

Au seuil du paysage

Tu sais ce qui se passe au seuil du paysage
et pourquoi ce pays ne publie plus son peuple
depuis que la parole est prête pour la pierre
et qu'il ne reste rien à pétrir dans la paix
car tout a été dit sur les versants du monde
avant même que l'homme ait nommé sa nature
et ce n'est que poussière à perte de poussière
que d'exprimer son coeur sur le verbe à venir
aussi te laisses-tu porter par les présages
toi qui sais le haut lieu où l'âme est légitime
et ne voyant que l'ombre à la place du corps
te souviens-tu d'un ciel à vivre de tout temps
Juan Garcia, Extrait de Corps de gloire

vendredi 11 janvier 2019

Une sorte d'église

Vent, eau, pierre

L'eau perce la pierre,
le vent disperse l'eau,
la pierre arrête le vent.
Eau, vent, pierre.
le vent sculpte la pierre,
la pierre est coupe de l'eau,
l'eau s'échappe et elle est vent.
Pierre, vent, eau.
Le vent dans ses tours chante,
l'eau en marchant murmure,
la pierre immobile se tait.
Vent, eau , pierre.
On est autre et personne :
entre leurs noms vides
passent et s'évanouissent
eau, pierre, vent.

À Roger Caillois
Octavio Paz, Extrait d'Octavio Paz Oeuvres

jeudi 10 janvier 2019

Prêts, partez



Tous réunis sur la même ligne de départ
Les enfants main dans la main
Attendant le signal du maître
Et c'est attention les enfants
À vos marques, prêts, partez

Au loin un avion qui décolle
Chaque enfant rêve de voler
Au-dessus de la cour d'école
L'histoire continue d'avancer
Pour ceux qui les regardent tomber
À vos marques, prêts, partez

Et nous irons comme ça
Jusqu'à la fin du monde

Fin du discours, débat terminé
Le maître déclare la chasse ouverte
Les enfants armés jsuqu'aux dents
Tombent comme des grains de sable

Au milieu du désert
Et du haut des montagnes, fatigués
Les dieux détournent le regard
Du soleil qui brûle de plus en plus fort
Et des glaciers qui fondent dans le nord
À vos marques, prêts, partez

Demain, demain sûrement
Nous atteindrons la fin des temps
Sur les écrans comme si nous y étions
Nous verrons l'Occident
Disparaître sous l'océan
Non, non, non, non
À vos marques, prêts, partez

Nous irons comme ça
Jusqu'à la fin du monde

Tous réunis face au même horizon
Les enfants fatugués de tirer
Décident de lâcher les cordes
Et le maître s'écrase dans le vide

Demain, demain sûrement
Nous atteindrons le bout du monde
Servants ou servis
Esclaves hier, maîtres aujourd'hui
Oh non, non, non, non
À vos marques, prêts, partez

Et nous irons comme ça
Jusqu'à la fin du monde
On your mark, get set, go....

mercredi 9 janvier 2019

7 O`Clock News / Silent Night




This is the early evening edition of the news.
The recent fight in the House of Representatives was over the open housing section of the Civil Rights Bill.
Brought traditional enemies together but it left the defenders of the
measure without the votes of their strongest supporters.
President Johnson originally proposed an outright ban covering discrimination by everyone for every type of housing but it had no chance from the start and everyone in Congress knew it.
A compromise was painfully worked out in the House Judiciary Committee.
In Los Angeles today comedian Lenny Bruce died of what was believed to be an overdoes of narcotics.
Bruce was 42 years old.
Dr. Martin Luther King says he does not intend to cancel plans for an open housing march Sunday into the Chicago suburb of Cicero.
Cook County Sheriff Richard Ogleby asked King to call off the march and the police in Cicero said they would ask the National Guard to be called out if it is held.
King, now in Atlanta, Georgia, plans to return to Chicago Tuesday.
In Chicago Richard Speck, accused murderer of nine student nurses, was brought before a grand jury today for indictment.
The nurses were found stabbed an strangled in their Chicago apartment.
In Washington the atmosphere was tense today as a special subcommittee of the House Committee on Un-American activities continued its probe into anti-Viet nam war protests.
Demonstrators were forcibly evicted from the hearings when they began chanting anti-war slogans.
Former Vice-President Richard Nixon says that unless there is a substantial increase in the present war effort in Viet nam, the U.S. should look forward to five more years of war.
In a speech before the Convention of the Veterans of Foreign Wars in New York, Nixon also said opposition to the war in this country is the greatest single weapon working against the U.S.
That's the 7 o'clock edition of the news,

Goodnight.
Silent night
Holy night
All is calm
All is bright
Round yon virgin mother and child
Holy infant so tender and mild
Sleep in heavenly peace, sleep in heavenly peace.

Paul Simon

lundi 7 janvier 2019

Colline de l'étoile

Ici les anciens accueillaient le feu
Ici le feu créait le monde
A midi les pierres s’ouvrent comme des fruits
L’eau ouvre les paupières
La lumière coule sur la peau du jour
Goutte immense où le temps reflète et s’apaise.
Octavio Paz, Extrait de Liberté sur parole

vendredi 4 janvier 2019

Les lettres fatales

« Je commence et recommence. Mais je n’avance pas. Chaque fois qu’elle atteint les lettres fatales, la plume recule : un interdit implacable me ferme le chemin. Hier, investi des pleins pouvoirs, j’écrivais sans peine, sur la première feuille disponible : un fragment de ciel, un mur (impavide devant le soleil et mes yeux), un pré, un autre corps. Tout me servait : l’écriture du vent, celle des oiseaux, l’eau, la pierre. Adolescence, terre labourée par une idée fixe, corps tatoué d’images, cicatrices resplendissantes ! L’automne menait paître de grands fleuves, accumulait des splendeurs sur les sommets de Mexico, phrases immortelles gravées par la lumière des les roches pures de l’étonnement.

Aujourd’hui, je lutte seul avec une parole. Celle qui m’appartient, celle à laquelle j’appartiens : pile ou face, aigle ou soleil ? »

Octavio Paz, Extrait de Liberté sur parole